Le déclin de Sud Radio

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Résumé publié à l’origine en 2013 par Le Transistor à l’arrivée de Fiducial.

QUI N’A PAS DE MEMOIRE, N’A PAS D’AVENIR !

Sud Radio : on efface tout et on recommence

C’est le premier constat qui s’impose à l’issue de la vente aujourd’hui de Sud Radio par son actuel propriétaire, l’opérateur orléanais Sud Radio Groupe (ex groupe Start), à Fiducial, firme lyonnaise spécialisée initialement dans l’expertise comptable et le droit des entreprises.

Aux commandes de la station généraliste du sud de la France depuis huit années, l’éditeur des antennes musicales Vibration, Voltage, Wit ou Ado affiche un bilan bien lourd, au plan financier, social ou éditorial.

L’histoire de ce gâchis débute à l’automne 2005, lorsque le groupe pharmaceutique Pierre Fabre se sépare d’une Sud Radio en perte de vitesse depuis peu. La station fait alors face à une concurrence régionale et nationale de plus en plus énergique (développement des radios locales privées Totem et 100%, structuration du réseau France Bleu, succès des programmes de RMC et RTL dans le Sud-Ouest), et a de plus en plus de mal à renouveler la formule qui faisait son charme dans les années 80 et 90 : des programme populaires et positifs, une information locale et nationale de qualité, des rendez-vous sportifs dominés par le rugby, et une proximité très développée avec les auditeurs et leurs terroirs.

Peu convaincu alors par une relance de cette recette, Start, le nouveau propriétaire s’appliquera à casser les fondamentaux de Sud Radio pour l’emmener sur les chemins de la « talk-radio », le format qui réussit à RMC.

Parallèlement, la station qui vivait toujours en 2005 comme une grande généraliste des années 80 va connaître une importante cure d’amaigrissement imposée par les cost killers : plan social, réduction des emplois administratifs, déménagement des locaux spacieux du centre-ville de Toulouse, suppression de la discothèque, fermeture des bureaux locaux de Montpellier, Perpignan et Pau…

Cette diminution des moyens et cette entrée dans l’ère du low cost s’accompagnera d’une perte d’identité et d’un brouillage de l’image de la radio. L’histoire de l’ancienne grande radio semble reniée, un certain esprit « terroir » est abandonné et les codes propres au Sud-Ouest de la France sont gommés pour plaire aux nouvelles zones d’émission desservies par Sud : Marseille, Clermont-Ferrand, Limoges puis Paris en août 2011.

Depuis 2005, les changements de caps et de formules éditoriales se sont succédés, achevant d’anéantir totalement le peu de réputation dont jouissait Sud Radio à Toulouse et dans quelques fiefs de la région Midi-Pyrénées, sans pour autant attirer de nouveaux auditeurs dans les autres grandes métropoles couvertes plus récemment.

En 2006, Sud Radio devient tout d’abord une radio de débats. On y supprime toute trace de musique et l’antenne devient essentiellement parlée et alimentée par les auditeurs. On cause de tout et de rien pour la combler : d’actualité, de politique, de télé, de sport, de sexualité ou de surnaturel.

Rétropédalage en 2008 et retour à une grille plus généraliste inspirée du Sud Radio d’avant 2005 ; les jeux et les émissions de service refont leur apparition sur l’antenne, la musique ensoleillée également. Mais seules les émissions historiques de la chaîne semblent alors encore tenir la baraque : l’humour « terroir » des Chevaliers du Fiel et du Duo des Non et les retransmissions de rugby.

Nouveau virage à la rentrée 2011 : Sud Radio revient finalement à l’interactivité mais en allant sur le terrain du prétendu « politiquement non correct » pour inaugurer sa nouvelle fréquence parisienne. L’image de la radio des terres radicales du Sud-ouest prend alors très rapidement une coloration droitière, à l’occasion d’un dérapage sur « le lobby juif » et de certaines sorties de sa nouvelle tête de gondole, l’éditorialiste Robert Ménard.

Face à l’échec de cette énième nouvelle formule, Sud Radio perd alors toute ambition quelques mois plus tard. Depuis l’été 2012, et la décision de Sud Radio Groupe de se débarrasser de son navire amiral, l’antenne est une coquille quasi-vide tenue par une poignée de journalistes et animateurs encore présents au siège de Labège en banlieue toulousaine (le reste étant enregistré depuis Paris). Un fil musical sans grande saveur occupe à présent une très grande partie de l’antenne, et seuls les rendez-vous d’information du matin et du soir et le rendez-vous humoristique quotidien du Duo des Non constituent encore quelques ilots de parole en semaine.

Comme un bateau à la dérive, Sud Radio attend donc son nouveau propriétaire en se demandant bien à quelle sauce elle sera cette fois-ci mangée. Du côté des auditeurs, nombreux sont ceux qui sont partis voir ailleurs et ne cherchent plus à comprendre le positionnement de Sud Radio. Radio du rugby et de la déconne ? Sous RMC ? Radio d’opinion ? Radio du Sud ? Radio de droite ? Radio musicale ?

Si le bilan 2005-2013 en terme d’image est catastrophique, le bilan chiffré est enfin également sans appel :

  • seule une vingtaine de salariés fait aujourd’hui tourner la boutique quand ils étaient 80 huit ans plus tôt ;
  • la rédaction qui employait 28 journalistes en 2005, n’en compte plus que 10 en 2013 ;
  • l’audience a dangereusement dévissée, si 550 000 personnes écoutaient quotidiennement Sud Radio en novembre 2005, elles seraient juste un peu plus de 200 000 aujourd’hui ;
  • de 15 millions d’euros en 2004, le chiffre d’affaires a plongé à 3,5 millions d’euros en 2012 ;
  • enfin, d’après les Echos, Sud Radio a été vendue pour 7 millions d’euros à Fiducial alors qu’elle en avait coûté approximativement 15 au groupe Start initialement.

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Updated/maj. 28-12-2021

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